Clip – Je n’écrirai plus si souvent – Marquis Featuring Étienne Daho.
Un jour de septembre 2019, Saint-Malo, le monde est silencieux.
Nouvelle lunaire de Rennes, la cruauté est de retour.
Raptus et grand sommeil, la fête s’est achevée.
Conradt Veidt ne danse plus.
Saudade.
De nos jours, mêmes lieux, mêmes ciels maudits, mêmes nuits morcelées.
Deux fenêtres, face à l’amer et face aux rues viles. Vue plongeante sur la ville où tout a commencé il y longtemps. Pour les amoureux solitaires et les corsaires nyctalopes, Rennes était une fête et la passion contagieuse.
Deux fenêtres dialoguent à distance dans un bal nocturne entêtant où se croisent fantômes du passé et mouettes courageuses, couleurs en pointillés noctambules et ombres amicales. Jeux de lumières. Voyage immobile.
Daho efface le vent et chante en clair-obscur en contemplant son passé. Avec bienveillance et amour comme il sait si bien le faire. Les copains d’hier sont encore là aujourd’hui, derrière dans la pénombre. Daho chante cette mélodie de Darcel sur laquelle il a posé ses mots pudiques et touchants. Cette mélodie hommage déjà familière, comme une évidence, comme une amie de toujours. Dans sa voix suave, les échos intimes de son chant d’avant. Tout est recommencement.
Deux fenêtres comme deux ouvertures qui communiquent, télépathie géographique, deux lieux unis par le murmure lointain des âmes dispersées. Sur les ondes brouillées par d’électriques secousses, des mots teintés d’espoir malgré le manque et la peine. Deux mondes comme les deux faces d’une même pièce jetée en l’air. Les morts, les vivants, c’est la même famille. Ce n’est qu’une question de point de vue.
Deux fenêtres comme la promesse d’un passage, l’esquisse d’une voie dans les interstices de nos mémoires rajeunies. Deux fenêtres en communion post-mortem. Derrière les chairs, la vie continuera, ça ira. Regards croisés et trajectoires parallèles. Plonger du haut de cette tour, saut de l’ange. Repartir à l’aventure. Quitter la ville, rouler vers la baie et son aurore lumineuse. Peu à peu s’éloigne le chant des terres. L’éclaircie et le sel sur nos joues.
Je n’écrirai plus si souvent, un clip (du fidèle Romain Winkler) à la poésie elliptique, entre présences surnaturelles et convulsions brutales qui rappellent le charisme scénique et la gestuelle épileptique de Philippe Pascal. Un trip délicat, doucement halluciné entre les lumières de la ville et l’infini pastel de l’horizon marin. Un recueillement habité du fol espoir de recroiser les âmes raptées par les forces occultes. Un clip hanté par la force de la fidélité artistique.
Entre Daho, Darcel et Marquis de Sade, entre Rennes et Saint-Malo : les liens du son.
Le brouillard n’est peut-être pas définitif.
© Matthieu Dufour
(et quelques titres empruntés à Étienne Daho, Marquis de Sade et Marc Seberg)
Quelques mots sur l’album de Marquis ici : Marquis – Aurora

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